Le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines de Daremberg et Saglio

Article FAMILIAE ERCISCUNDAE

FAMILIAE ERCISCUNDAE

FAMILIAE ERCISCUNDAE ACTIO. -Action en partage d'une hérédité [ACTIO, IIEREDITAS]. Aux termes de la loi des Douze-Tables, les créances (nomina) et les dettes héréditaires (obligationes) étaient en principe partagées de plein droit (ipso jure) entre les héritiers, en proportion de leur part héréditaire 2 ; mais les objets corporels de la succession demeuraient indivis entre eux (communio), en sorte que chaque héritier avait une part dans chaque atome des biens de l'hérédité. Ils pouvaient partager à l'amiable ces choses corporelles par traditions ou mancipations réciproques 3, mais chacun d'eux était maître de contraindre les autres 4 au partage, pour sortir d'indivision, par l'action familiae erciscundae 5. Le mot familia désigne ici l'ensemble des biens du défunt, et erciscere vient de erctum ciere, qui signifie « demander la division ° ». Suivant Rein, c'est à tort que Servius' affirme que ciere voulait dire dividere : il é tait synonyme de vocare3. L'action familiae erciscundae ne peut être intentée qu'une fois et contre tous les autres héritiers ; si l'on y a omis, volontairement ou non, certains objets, il faudra recourir pour les partager à l'action communi dividundo 9. Du reste notre action était soumise à plusieurs règles communes à l'action en partage d'objets corporels étrangers à une succession [COMMUNI DIVIDUNDO ACTIO], et à l'action en règlement de limites [FINIUM REGUNDORUM ACTIO]. Ces trois actions divisoires, au temps du système de procédure formulaire, renfermaient à la fois une condemnatio et une adjudicatio i° ; c'étaient des judicia duplicia, c'est-à-dire des instances dans lesquelles chacune des parties pouvait être condamnée ", à raison des obligations réciproques nées entre elles quasi ex contractu, pour fruits perçus, dommages causés ou dépenses utiles faites pendant l'indivision 12, ou pour soulte de partage 13. C'étaient des actions civiles, personnelles et de bonne foi, in per FAN 973 FAN sonam et bonae fideil, mais elles avaient mixtam causam un double but, en ce sens qu'elles autorisaient le juge à prononcer des condamnations à raison de certaines prestations dues et à transférer la propriété par adjudicatio. En effet, l'adjudication produisait ce résultat quand le judicium était ce qu'on appelle legitimum 3. L'action familiae erciscundae fut appliquée au partage non seulement d'une hérédité testamentaire ou ab intestat déférée par la loi des Douze-Tables, mais d'une succession déférée d'après une loi quelconque, un sénatus-consulte ou une constitution impériale On l'étendit même à la succession prétorienne entre bonorum possessores [BONORUM POSsESSIO], et au cas de restitution d'hérédité en vertu du sénatus-consulte Trébellien 5, etc. Cette action pouvait servir à faire résoudre une question de propriété, par exemple au cas où le cohéritier demandeur était en possession et se voyait contester par son adversaire son droit à l'hérédité°. C'est même en ce sens que de savants interprètes ont pensé qu'elle avait mixtam causarn7, mais, ce n'est là qu'un caractère• tout à fait accidentel'. Le partage, chez les Romains, était considéré au fond comme un échange de parts indivises; aussi, d'après l'opinion qui avait prévalu, il était réputé translatif et non déclaratif de propriété, en sorte que l'hypothèque, établie par un des copropriétaires sur sa part indivise pendant la communio, subsistait après l'adjudicatio sur la moitié de son lot et sur la moitié de l'autre L'arbiter familiae erciscundae pouvait diviser en lots l'immeuble unique à partager 10. Si la chose n'était pas commodément partageable, le juge pouvait la liciter11, ou l'adjuger à un seul des héritiers, en le condamnant à payer aux autres une indemnité en argent, ou soulte12, ou bien adjuger à l'un la nue propriété et à l'autre l'usufruit; quand il y avait plusieurs objets à partager, corpora, le juge devait les répartir en lots égaux, autant que possible, en rétablissant au besoin l'égalité par des soultes 73, et en constituant, s'il y avait lieu, des servitudes entre les divers